CONTINUITE ECOLOGIQUE ET CHAUSSEES DE MOULINS


Qu'est-ce que la continuité écologique ?


Historique législatif

En octobre 2000, la directive (2000/60) européenne cadre sur l'eau (DCE) fixe comme objectif aux Etats membres, au minimum, le bon état des eaux .

Pour consulter le texte : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:32000L0060&from=FR

En 2009-2010, une partie des lois dites du « Grenelle de l'environnement » sont une transposition de la directive, elles mettent en avant le rétablissement de la « continuité écologique » d'un cours d'eau, concept défini par «  la libre circulation des organismes vivants et leur accès aux zones indispensables à leur reproduction, leur croissance, leur alimentation ou leur abri, le bon déroulement du transport naturel des sédiments ainsi que le bon fonctionnement des réservoirs ».

Pour consulter le texte : https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006833151&cidTexte=LEGITEXT000006074220
La restauration du milieu naturel, la réduction de l'eutrophisation et de l'envasement liés aux retenues, la restauration de la libre circulation des poissons et des sédiments sont les objectifs à atteindre pour assurer une meilleure qualité des eaux. En application, il est décidé de supprimer les « seuils » c'est-à-dire pour l'essentiel, barrages et chaussées de moulins qui barrent le lit des rivières et font obstacle à la libre circulation des eaux. Les barrages fonctionnels (électricité, soutien d'étiages) ne sont pas concernés par une suppression, en revanche les chaussées de moulins qui n'ont plus « d'utilité » doivent être, soit arasées, soit « effacées » (sic) si un aménagement (passe à poissons par exemple) n'est pas suffisant pour le « rétablissement  de la continuité écologique». Un plan national de recensement est alors mis en place : le ROE (référentiel des obstacles à l'écoulement), réalisé par l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema).
Pour voir la carte : http://carmen.carmencarto.fr/66/ka_roe_current_metropole.map
Ensuite, les cours d'eau ont été classés en deux catégories : la première où aucune nouvelle construction n'est possible ( Le Viaur en aval du barrage de Thuriès, Le Viaur de sa confluence avec le Bouzou jusqu'à la retenue de Pont-de-Salars) ; la seconde où il faut restaurer la libre circulation des poissons migrateurs et le transit des sédiments, dans les 5 ans après la publication de la liste (octobre 2013 en ce qui concerne Midi-Pyrénées) : le Viaur en aval du barrage de Thuriès est là encore concerné et est donc en catégorie un et deux à la fois.
Pour voir le classement des cours d'eau Midi-Pyrénées : http://www.occitanie.developpement-durable.gouv.fr/le-classement-des-cours-d-eau-r7406.html
En 2016 et 2017, face aux difficultés de mise en œuvre de la loi, un nouveau délai de cinq ans peut être accordé, sur demande, pour les propriétaires des chaussées ayant déposé un dossier d'aménagement (avant 2018 pour le Viaur) et les moulins équioés de turbines sont considérés à part.
Pour voir la loi des 5 ans :
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do;jsessionid=81AEDFBB4FF34901C5EA2F0EB478DDE6.tpdila13v_1?idArticle=JORFARTI000033016340&cidTexte=JORFTEXT000033016237&dateTexte=29990101&categorieLien=id et celle des moulins produisant de l'électricité (article 15): https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do;jsessionid=19BB31994ED22021DBB35B2F7542989F.tplgfr37s_3?idArticle=JORFARTI000034080238&cidTexte=JORFTEXT000034080223&dateTexte=29990101&categorieLien=idL'aménagement ou la destruction des chaussées de moulin non productrices d'hydro-électricité (sur le Viaur seuls Pont de Cirou et la Vicasse sont équipés de turbines mais ils ne semblent pas pouvoir déroger aux règles car ils ne seraient pas ... en règle avec l'administration) est donc à l'ordre du jour de Tanus à Laguépie, comme en beaucoup d'autres endroits en France (il y aurait environ 60 000 chaussées de moulins sur le territoire).

.

Des oppositions

La mise en œuvre de la continuité écologique, se traduisant par la destruction des chaussées de moulins, a provoqué de nombreuses réactions d'oppositions qui ont abouti, en 2015, à une campagne de demande de moratoire initiée par douze associations ( L'Observatoire de la continuité écologique et des usages de l'eau (OCE), la Fédération Des Moulins de France (FMDF), la Fédération française des associations de sauvegarde des moulins (FFAM), l'Association des riverains de France (ARF), l'Union nationale des syndicats et associations des aquaculteurs en étangs et bassins (UNSAAEB), Electricité autonome française (EAF) et France Hydro Electricité (FHE)

Quels sont leurs arguments contre la destruction ?

Elles mettent en avant d'abord les avantages économiques et sociaux des « seuils » : potentiel de petite hydraulique (cas de la Vicasse, de Pont de Cirou), valeur touristique (cas de Lagarde Viaur,dela Vicasse) et patrimoniale des chaussées et des moulins. Ensuite, pour elles, le rôle écologique de ces seuils de faible hauteur n'est pas néfaste : les retenues sont favorables à certaines espèces (carpes, tanches, « poissons blancs ») et contribuent à une diversification du milieu, elles ne bloquent que d'une manière négligeable le transport des sédiments, elles régulent les petites crues et modèrent les étiages, elles bloquent rarement les poissons migrateurs, elles ralentissent la circulation des pollutions.

En conclusion, pour elles, le coût des destructions est bien supérieur aux avantages qu'elles apporteraient (elles les jugent hypothétiques) à la rivière. Enfin, elles contestent le caractère scientifique de la notion de continuité écologique.

Pour voir le principal site d'opposition : http://continuite-ecologique.fr/opposition-suppression-des-seuils/

Dernier moulin sur le Viaur avant le barrage de Thuriès : le moulin de Bonduy est un cas exemplaire qui peut "faire école".

Comme tous les autres possesseurs de moulins sur le Viaur, son propriétaire doit se mettre en règle avec la loi sur la continuité écologique.

Les études, confiées au bureau NALDEO (coût 111 675,56 €), réalisées par le Syndicat Mixte du Bassin Versant du Viaur (SMBVV) proposent soit des aménagements, soit "l'effacement" (le terme destruction semble ne pas pouvoir être utilisé par l'administration, pourtant il est parfaitement adapté) de la chaussée pour permettre la remontée des poissons migrateurs.

L'effacement (subventionné à 80 %) est estimé à 29 211 € et resterait à charge au propriétaire 5842 €. Une étude géotechnique sur le pont qui est en amont à 430 mètres ne semble pas être prise en compte dans ce coût.

L'aménagement d'une passe à poissons (passe de 9 bassins) coûterait 194 617 € et resterait au propriétaire à régler entre 58 385 € (si subventionné à 70%) et 177 090 € (si subvention de 10 %).

L'alternative financière laissée au propriétaire est assez claire : il ne peut de ce point de vue que choisir "l'effacement" de sa chaussée. Mais il se trouve que le moulin de Bonduy est dans la famille du propriétaire depuis le XVII ème siècle et qu'il ne tient pas à détruire ce patrimoine.

On peut le comprendre, même si l'on est favorable à la remontée des poissons migrateurs.

Tous les autres moulins : sur le VIAUR , Tourène (Pampelonne) - La Roque (Lespinassole/Crespin) - Pont de Cirou (Mirandol)- La Calquière et Le Port de la Besse (Mirandol) - La Souleyrie et La Vicasse (Bor-et-Bar) - Lagarde-Viaur et La Granilié (Montirat) - Les Arènes (Laguépie) - Seuil de Saint-Martin (Saint- Martin de Laguépie), sur le Lézert le moulin de la Galié (Naucelle) sont dans la même situation de choix cornélien.

On comprend d'autant mieux le propriétaire du moulin de Bonduy que sa chaussée se trouve à l'aval immédiat (1700 mètres) du barrage de Thuriès qui lui ... n'est pas concerné par la loi (le classement en catégorie 2 du Viaur s'arrête aux pieds du barrage). Les calculs sont simples : en gros environ 1000 € le mètre la remontée de poissons ...vers un obstacle infranchissable (de fait, un peu plus, si l'on y ajoute le denier du contribuable et les frais géotechniques non estimés).

Ajoutons que toutes les autres chaussées sont déjà équipées de passes à poissons, construites au passage de l'an 2000 (coût, sans les études : 457 347 € réglés par les contribuables) pour se conformer à la loi précédente. Avec de tels équipements, on pourrait donc légitimement penser que les poissons peuvent passer les chaussées de moulins et qu'elles ne sont pas pour eux des obstacles et donc que la loi sur la continuité écologique est déjà respectée.

Qu'en est-il exactement du passage des poissons aux chaussées de moulins ?